Tunis, Sidi Bou Saïd — Ce dimanche, plus d’un millier de personnes se sont rassemblées sur les quais du port de Sidi Bou Saïd pour accueillir la Global South Unity Flotilla, la plus grande flottille humanitaire jamais organisée à ce jour. Une foule venue de toute la Tunisie — familles, militants, responsables associatifs, syndicalistes, citoyens anonymes — s’est réunie dans une ambiance mêlant ferveur, gravité et espoir.
Composée de plusieurs navires battant pavillon de pays du Sud global — d’Amérique latine, d’Afrique, d’Asie et du monde arabe — la flottille se prépare à franchir un cap historique : briser le blocus maritime imposé par Israël sur la bande de Gaza, en acheminant de l’aide humanitaire directement vers la côte palestinienne.
Une initiative d’ampleur sans précédent
La Global South Unity Flotilla s’inscrit dans la continuité des tentatives internationales de solidarité avec Gaza, mais avec une ambition et une coordination inédites. Son objectif est clair : faire parvenir vivres, médicaments, matériel médical et fournitures de première nécessité à une population éprouvée par plus de 17 ans de blocus, et des mois de guerre intensifiée.
Parmi les organisateurs figurent des ONG, des réseaux de solidarité du Sud global, des associations de la diaspora palestinienne et des personnalités issues de la société civile. Cette flottille représente une coalition Sud-Sud inédite, qui entend rappeler que les peuples du Sud, souvent marginalisés sur la scène internationale, peuvent se mobiliser ensemble pour défendre la justice et les droits humains.
Une mobilisation populaire forte à Tunis
L’arrivée des navires à Sidi Bou Saïd a été marquée par des scènes de liesse et de solidarité. Des banderoles aux couleurs palestiniennes, des chants, des slogans appelant à la levée du blocus, mais aussi des silences chargés d’émotion. Plusieurs participants ont témoigné leur détermination face à l’ampleur du défi.
« Ce n’est pas juste une flottille, c’est un cri des peuples oubliés vers un peuple assiégé », confie Amina, 36 ans, militante associative venue de Sfax.
Le port, d’ordinaire paisible, a été transformé en un véritable carrefour de luttes et de fraternité. Des discours ont été prononcés en plusieurs langues, et des cérémonies symboliques ont eu lieu pour honorer les victimes civiles à Gaza. Des médecins, des bénévoles, mais aussi des artistes, des journalistes et des universitaires figurent parmi les passagers.
Un défi logistique et politique majeur
La mission de la flottille n’est pas sans risques. Depuis plus d’une décennie, les tentatives de briser le blocus maritime ont souvent été confrontées à des interceptions brutales par la marine israélienne, parfois au prix de vies humaines, comme lors de l’assaut contre le Mavi Marmara en 2010.
Mais les organisateurs de la Global South Unity Flotilla affirment avoir pris toutes les précautions nécessaires, tant sur le plan juridique que logistique. Ils s’appuient sur un large soutien international et misent sur la visibilité médiatique pour dissuader toute opération militaire contre la mission.
« Ce que nous faisons est légal au regard du droit international humanitaire. C’est le blocus qui est illégal », martèle un coordinateur de la flottille, sous couvert d’anonymat.
Gaza, un appel à la conscience mondiale
Alors que la situation humanitaire à Gaza atteint un niveau critique — avec des centaines de milliers de personnes déplacées, des infrastructures détruites, un accès quasi inexistant aux soins et à l’eau potable — la flottille entend rappeler que l’inaction n’est plus une option.
« Nous ne sommes pas naïfs, mais nous sommes résolus », déclare Layla, une infirmière marocaine embarquée à bord. « Si les gouvernements ferment les yeux, alors ce sont les peuples qui doivent les ouvrir. »
Dans les jours qui viennent, les navires prendront la mer en direction de Gaza. Leur passage par Tunis restera comme un moment fort de mobilisation populaire, mais aussi comme un symbole du réveil du Sud global face à l’injustice.
Reste à savoir si cette flottille parviendra à franchir les lignes maritimes imposées par Israël, ou si elle rejoindra la longue liste des tentatives stoppées net. Quoi qu’il en soit, elle aura marqué les esprits, et envoyé un message clair : la solidarité n’a pas de frontières.