La présidence Macron traverse l’un des épisodes les plus critiques depuis le début de la Ve République. Fragilisé par la chute de son Premier ministre, par une majorité relative de plus en plus instable, et par une impopularité grandissante dans l’opinion, Emmanuel Macron est désormais directement visé par une motion de destitution, déposée ce mercredi à l’Assemblée nationale par les députés de La France Insoumise.
En conférence de presse, la cheffe de file du groupe LFI, Mathilde Panot, a lancé une charge d’une rare violence politique contre le chef de l’État, allant jusqu’à désigner Emmanuel Macron comme le « problème » du pays.
« Nous alertons solennellement : tous ceux qui tenteront de sauver le soldat Macron tomberont avec lui. Les insoumis ne se vendront jamais pour des places dans des ministères. Notre pays a un problème, et ce problème s’appelle Emmanuel Macron. Il doit partir. »
Une crise institutionnelle qui s’aggrave
La déclaration de Mathilde Panot intervient dans un contexte déjà tendu : le renversement du gouvernement Attal la semaine dernière, à la suite d’une motion de censure adoptée de justesse, a laissé l’Élysée sans cap politique clair, sans Premier ministre en poste, et sans majorité absolue. Le pouvoir exécutif donne aujourd’hui l’image d’un navire sans gouvernail, balloté entre les crises sociales, économiques et désormais institutionnelles.
Depuis plusieurs jours, le président peine à constituer un nouveau gouvernement. Plusieurs personnalités pressenties pour Matignon ont décliné, redoutant de devenir les prochaines cibles d’un système perçu comme à bout de souffle.
La motion de destitution : un geste politique fort, mais symbolique
Le dépôt d’une motion de destitution — une procédure rare prévue par l’article 68 de la Constitution — n’a quasiment aucune chance d’aboutir juridiquement. Il faut pour cela une majorité des deux tiers du Parlement réuni en Haute Cour, une hypothèse très improbable dans la configuration actuelle.
Mais l’acte est hautement politique. Il vise à signifier que la contestation du président ne vient plus seulement de la rue ou des urnes, mais désormais du cœur même de l’Assemblée nationale.
« Ce n’est pas une question de posture. C’est une question de responsabilité, » explique un député insoumis. « Le président a démontré qu’il gouvernait contre le peuple, contre le Parlement, et désormais contre le bon sens démocratique. »
Macron en perte de contrôle politique et symbolique
Si Emmanuel Macron continue d’affirmer qu’il entend « poursuivre son mandat jusqu’à son terme », les signaux d’alerte s’accumulent. Les sondages le placent au plus bas depuis son élection : selon une enquête récente de l’IFOP, seulement 16 % des Français lui font encore confiance pour affronter la crise actuelle.
L’Élysée garde le silence depuis la déclaration de Panot. Aucun communiqué officiel, aucun déplacement public. Le président, jadis omniprésent, semble aujourd’hui invisible, et son autorité, largement affaiblie.
Dans les couloirs du pouvoir, certains évoquent même la tentation du président de reprendre directement la parole, voire de consulter les Français par voie référendaire, afin de reprendre l’initiative. Mais autour de lui, les options rétrécissent.
Une majorité éclatée, des alliances introuvables
Le spectre d’une dissolution de l’Assemblée a été brièvement évoqué, mais les risques seraient considérables pour l’Élysée : les dernières projections donnent une poussée de l’extrême droite et un retour en force de la gauche unie, qui pourrait cette fois parvenir à former un gouvernement.
Les Républicains, eux, refusent pour l’instant de s’aligner. Ni soutien, ni rupture franche. Une forme de neutralité tactique qui empêche le président de recomposer une majorité stable.
« La vérité, c’est que plus personne ne veut se brûler les ailes à gouverner avec lui, » confie un élu centriste. « Et ceux qui s’en approchent tombent, les uns après les autres. »
Un climat politique délétère
Pendant ce temps, la colère continue de gronder dans le pays. Les manifestations contre la réforme du RSA, les coupes budgétaires dans les services publics, et la gestion de la crise migratoire contribuent à alimenter un climat de rejet profond, à la fois du gouvernement et de la figure présidentielle.
La motion déposée ce matin n’est peut-être pas la fin, mais elle marque un point de bascule symbolique. Pour la première fois depuis son élection, Emmanuel Macron n’est plus seulement contesté : il est frontalement mis en accusation.
Vers une fin de règne ?
L’avenir politique d’Emmanuel Macron semble suspendu à quelques fils : la capacité à réunir un gouvernement crédible, la résistance de ce qui reste de sa majorité, et peut-être, la réaction de l’opinion publique.
Mais dans les rangs des oppositions, une conviction s’impose : la page Macron est en train de se tourner, même si personne ne sait encore ce qui viendra après.
« Il est temps d’ouvrir un autre chapitre, » conclut Mathilde Panot. « Et ce chapitre, c’est au peuple français de l’écrire. »